Orkos

Orkos est l’acronyme de ORiginel KOSmos (cosmos originel). En grec, Orkos signifie “serment” (dans la mythologie grecque, Orkos ou Horkos est le fils de la déesse de la discorde Éris). L’entreprise répondait à un besoin d’aliments bruts tels que produits par la nature. A la base, ces produits crus et non transformés correspondaient au cahier des charges de l’instinctothérapie. C’est pourquoi les premières activités d’Orkos débutèrent en Suisse dans les années 70. J’ai rejoint Orkos en 1990 alors que j’étais intéressé par l’alimentation naturelle. Je peux décrire la période (1990-2000) où j’ai travaillé pour cette société.

Les entrepôts d’Orkos étaient situés à Provins, non loin des remparts médiévaux. Au début, l’essentiel de la clientèle était française. La plupart des produits venaient d’une sélection du marché de Rungis (vendus sous le label “Orkos selection”). Les produits secs (oléagineux, dattes…) bénéficiaient du label “Orkos prestige”  aux nombreuses garanties telles que les températures de séchage inférieures à 40°C. Les téléphonistes réceptionnaient le soir les commandes qu’ils saisissaient sur un programme maison intitulé LOVE (gérant l’activité depuis la prise de commande jusqu’à la facturation). Il fallait voir notre petite équipe de “coliseurs” butiner d’étal en étal pour préparer les commandes ! Puis, nos camions sillonnaient la France de dépôt en dépôt pour approvisionner nos clients : circuit ouest, circuit sud-est, ceinture de Paris…

Les circuits de distribution d’Orkos

La clientèle appréciait la qualité de nos produits et se développait. C’est ainsi que nous avons pu progressivement mettre en place nos propres filières : les imports directs. Bien souvent, il s’agissait d’un collecteur qui travaillait avec des paysans locaux. J’ai assisté aux premiers envois d’Indonésie, de Thaïlande et du Mexique ! Nous étions subjugués par ces fruits si satisfaisants : les mangues Arumanis d’Indonésie, les Wanis de Bali, les durians Ganyao de Thaïlande, les sapotes Mamey du Mexique… Tout ces arrivages venaient par avion pour garantir une fraîcheur optimale. C’est bien simple, Orkos a hissé le commerce de fruits exotiques à un niveau jamais atteint jusqu’alors ! Nous formions nos clients à la consommation de ses étranges saveurs sauvages : comment ouvrir un cempedack, faire mûrir les safous ou savoir quand déguster les canistels (sapote amarillo). A chaque envoi, nos fournisseurs nous adressaient des échantillons de fruits pour voir s’ils avaient un potentiel auprès des crudivores. C’est ainsi que nous avons trouvé des pépites : Keraji, Ciruella (sorte de prune mombin mexicaine délicieuse), Lucuma, Engkala…

Exemples de produits nouveaux à tester : jack décortiqué, ramboutan jaunes…

Nous avions l’impression de parcourir la forêt tropicale en dénichant ses merveilles.

Nos clients nous accompagnaient dans cette dynamique vertueuse. Bientôt l’import direct du Cameroun avec des mangues et des bananes d’une fraîcheur incomparable. Je suis nostalgique du Sougué et Boto de ce pays ! Puis le Vietnam et ses pommes de lait si délicates ! Le summum en terme de qualité fut atteint avec les produits de la Cordillères de Andes importés grâce à l’architecte chilien Michel Le Seigneur. Nous n’avons malheureusement pas pu rendre ces arrivages réguliers. Les fruits de la Cordillères étaient incomparables : des fruits frais aussi concentrés que des fruits secs ! Tout était bonifié par des conditions pédoclimatiques exceptionnelles : jamais je n’ai mangé meilleur avocat, nectarine, melon, tunas…

Je n’étais certes pas payé, mais je pouvais manger des papayes thaï, des coco fraîches… Seul le durian était trop rare pour que les bénévoles en profite. Au service achat : Bernard, Pascale et Alex communiquaient avec les producteurs et leur rendait visite. Alex ramenait des merveilles de Californie : des dattes bien sûr, et quelques fois des fruits frais telles que des grosses sapotes blanches que je trouvais encore meilleures que celle du Mexique. Nous avions même des Noix de Macadamia de Hawaï ! Tous ces fruits coûtaient chers. C’est pourquoi nous avons développé la filière espagnole et bientôt des cherimoya bio succédèrent aux conventionnels. Nous avons aidé un producteur à cultiver des avocats mexicains sauvages (qui se mangent avec la peau). Bref, nous soutenions toutes les initiatives toujours grâce à une forte demande qui venait désormais principalement d’Allemagne. Orkos a déménagé à Soisy-Bouy dans l’enceinte du château de Montramé. Cette période fut chargée : nous n’arrêtions pas de travailler entre l’activité d’Orkos et celle du centre national d’instinctothérapie. Je faisais tous les métiers : responsable de la réserve, téléphoniste, coliseur, ADN (Apporteur De Nourriture)… Je faisais aussi des séminaires pour présenter les fruits exotiques rares. Quel plaisir de faire découvrir ces merveilles naturelles que sont les mangoustans, les ramboutans, les sapotilles… Je donnais des conseils pour les faire mûrir, les conserver et les consommer. Malheureusement ce tableau idyllique fut vite entaché par de nombreuses interventions de l’administration. Orkos était affilié à l’instinctothérapie qui était la bête noire. La pression fut si grande que je décidais de partir en juin 2000.

Aujourd’hui, malgré le fait que j’ai quitté l’entreprise depuis de longues années, j’apprends avec émotion que l’entreprise est placée en redressement.

Je vous partage quelques images de cette époque :

Entre 1997 et 2000, j’ai mis en page les publications d’Orkos

J’ai même servi de modèle dans les publicités !

Parutions dans Naturlich Leben

Moi, en 1999 ?

Packaging de dates (miam !)

Salle à manger

Salon Genève présentation Orkos/instinctothérapie

Bernard, le “big boss”
Expédition de durian en barquette (photo Marc Léger)
Certains éclaireurs venaient à la rencontre du sauvage ! (Marc Leger)

Les dessins des enfants lors de notre concours :

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Commentaires

8 réponses à “Orkos”

  1. Avatar de Hélène
    Hélène

    Ça fait plaisir ces photos !!! Tu as si peu changé
    Bise

  2. Avatar de Guy-Claude Burger
    Guy-Claude Burger

    Merci pour ce très beau témoignage !

  3. Avatar de Alex (ancien du service informatique et achats - international)
    Alex (ancien du service informatique et achats – international)

    Merci Benoît pour cette magnifique et authentique présentation d’Orkos, une entreprise qui fut notre vie, en quelque sorte…

    Dommage que certains rats aux pratiques contestables se soient emparés de notre beau navire pour, au final, le faire ainsi couler.

  4. Avatar de Bernard Mercier

    Super article Benoît. Très nostalgique tant pour l’ambiance bien rendue que la description enthousiaste des fruits.
    Personne ne pourra nous le prendre.
    Bernard

  5. Avatar de Benoit Vandangeon
    Benoit Vandangeon

    Merci pour vos commentaires ! J’ai rajouté quelques photos que j’ai trouvé dans le disque dur. Que de bons souvenirs, et le sentiment d’avoir œuvré pour une cause qui était bien belle !

  6. Avatar de jacques Vandangeon
    jacques Vandangeon

    Une triste nouvelle . Donnant lieu à un bel article .

  7. Avatar de Thierry
    Thierry

    Merci pour ce beau témoignage ! Cela me rappelle une soirée au Mazet, où tu nous avais raconté une partie de cette aventure.

  8. Avatar de Vincent PP
    Vincent PP

    Ton récit, teinté de nostalgie que je peux en partie comprendre, semble aborder Orkos avec une certaine indulgence. Mais l’entreprise ne peut être dissociée du contexte dans lequel elle a évolué. Certes, Orkos offrait des fruits exotiques délicieux, avec une équipe dévouée et une ambiance de travail quelques fois, pour vrai, grisante. Mais il ne faut pas oublier que cette entreprise faisait partie d’une aventure communautaire ayant causé de graves dégâts humains, familiaux et personnels, notamment sur des enfants, en parallèle des aspects positifs que tu évoques. D’ailleurs, sans ces côtés positifs, les conséquences négatives n’auraient probablement pas pu prendre cette ampleur. Ne parler que des bons côtés, même en cette période où l’on apprend la fin d’Orkos et où l’on peut ressentir une certaine mélancolie, risquerait de donner une vision incomplète, notamment pour ceux qui ne connaissent pas bien cette histoire. C’est dans cette perspective que je souhaite apporter un point de vue complémentaire.

    Déjà, la manière dont tu en es parti en juin 2000 est très révélatrice de l’atmosphère délétère qui y régnait (et, note pour ceux qui comprendront : les distinctions que certains aiment faire entre les périodes avant et après 1997 sont largement superficielles). Le management y était souvent inhumain, avec des heures de travail excessives et une pression psychologique dès qu’on avait une “mauvaise attitude”. Le système de travail “bénévole”, en échange d’avantages en nature, était tout simplement illégal et aurait dû entraîner de lourdes sanctions contre G en particulier. L’administration et la justice n’ont pas agi sans raison, comme on pourrait le croire en te lisant, mais elles auraient sans doute été bien plus sévères si la vérité avait été pleinement révélée lors des différentes perquisitions et enquêtes. Mais nous vivions dans le secret et le mensonge face à l’extérieur. De manière générale, ce mépris de la loi reflétait bien l’essence perverse du mouvement. Orkos s’appuyait, au-delà de la simple vente de fruits, sur une idéologie idéalisant un hypothétique état naturel de l’homme, antérieur à toute civilisation, et conduisant à un rejet des normes juridiques et morales. Rien de mieux pour créer un terrain fertile à la manipulation et à l’exploitation des gens, au travail comme dans les autres aspects de notre vie, car quand il faut bannir les normes sociales sous prétexte qu’elles seraient contraires à l’état de nature, on peut alors tout réinventer, et tout justifier, d’autant plus si on a la verve rhétorique de G… Cela a mené à toutes sortes de dérives, y compris les plus graves, telles que, il est nécessaire de le dire, la pédophilie. Plusieurs membres, dont des pilliers d’Orkos, étaient des prédateurs d’enfants. Je connais personnellement au moins douze victimes. Cet esprit anti-social et renversant les valeurs dans toutes les facettes de la vie était au fondement même de ce qu’était l’entreprise.

    En somme, Orkos, c’était aussi cela, malheureusement. Ce n’était pas seulement la datte Plum et la sapote Chico. Orkos a reflété la personnalité de son fondateur et de ses membres, et elle a perduré grâce à des personnes rêvant d’un monde meilleur, souvent trop généreuses et pas assez protectrices d’elles-mêmes, séduites par des discours révolutionnaires et manipulées par un pédophile se prétendant, au fond, capable de sauver le monde. Il faut fuir de telles gens ! Et tu as bien fait à l’époque ! Alors il faut que quelqu’un le dise ici. Alors que cette entreprise semble toucher à sa fin, il est probablement juste de dire que c’est une bonne chose, en fin de compte.

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