Dans le fil telegram d’acclimatons, on a posté une brochure jardinage de Carrefour où l’enseigne proposait des avocatiers à la vente (sans que l’enseigne ne juge nécessaire de préciser la variété). Un nombre croissant de pépinières et jardineries proposent aussi de l’avocatier. L’avocatier devient-il un fruitier commun, comme le cerisier, ou le pommier ? Je suis plutôt content que l’offre se généralise. Toutefois, je pense qu’elle doit être accompagnée d’un conseil avisé afin que le jardinier ne soit pas un bête consommateur. En effet, les plantes tropicales de part leur inadaptation à nos conditions constituent une arnaque idéale : puisqu’il faut les renouveler chaque année ! Elles figurent ainsi au palmarès de l’obsolescence programmée ! Dans ce contexte acheter un avocatier, c’est le risque d’aller de déceptions en déconvenues…
L’idéal serait que parallèlement à la filière espagnole apte à inonder le marché, un filière locale se développe. Et c’est effectivement le cas, mais les végétaux ont besoin de temps pour pousser et même si depuis quelques années des pépiniéristes se préparent, l’offre locale n’est pas encore prête (à l’heure où je tape ce texte !). Ce qui s’est passé pour les agrumes est exemplaire : aujourd’hui un nombre croissant de pépiniéristes s’évertuent à proposer une gamme complète de citrus adaptée à nos régions. Et cela marche : ces pépinières rigoureuses dans leurs pratiques et leurs sélections sont dévalisées et les jardiniers préfèrent dépenser un peu plus pour une plante dont ils connaissent le porte-greffe et la variété. Ils peuvent également comparer leurs conditions climatiques à celles indiquées par le pépiniériste. Je ne suis pas toujours en phase avec certains chiffres de rusticité mis en avant. La vague de froid de février 2018, m’a permis de relativiser les températures annoncées et de me rendre compte que les informations sur les porte-greffes et les variétés ne se vérifiaient pas toujours dans la “vraie vie”. Donc prudence, prévoyez toujours un peu de marge et n’éloignez pas trop vos plantes frileuses des murs !
Certains pépiniéristes français sont motivés pour proposer prochainement des avocatiers rustiques. Ils procèdent méthodiquement en s’inspirant de ce qui a été fait sur les agrumes. Ils testent des porte-greffes et des variétés résistantes. Certains ont même expérimenté la reproduction clonale pour essayer d’avoir un PG dont le comportement et la résistance au froid sont prévisibles. Les pépiniéristes seront aptes à fournir des conseils pour que l’acclimatation puisse réussir. Cela me fait plaisir de constater cet engouement à la fois des professionnels et des jardiniers pour une large gamme de plantes exotiques. Nous partons de loin : aujourd’hui encore sur les sites web, rares sont les photos et les descriptions qui collent à l’article vendu. On ne sait pas si l’on doit se fier au nom de l’article, à sa photo ou à sa fiche descriptive ? Des gens m’ont rapporté que certains avocatiers vendus comme greffés ne l’étaient pas, que des avocatiers mexicains ne sentaient pas l’anis (les feuilles froissées d’avocatiers de type mexicain sont reconnaissables à cette odeur). J’ose espérer que tout ces égarements sont des histoires anciennes et que désormais, on peut se fier aux informations et aux variétés vendues. Il est toujours embêtant d’avoir été victime d’erreurs d’affichage ou d’identification.
Ce mois-ci, j’ai été frappé par cette rencontre avec l’avocatier d’Ouganda planté à Nîmes. Le nîmois qui l’a planté ne se rend peut être pas compte de cet exploit ! Finalement, les gens qui n’ont pas trop de préjugés sont les plus aptes à tenter l’impensable. Et cette audace porte parfois de délicieux fruits ! Bravo à tous ces expérimentateurs. Cela motive pour continuer à acclimater des fruitiers venus d’ailleurs.
“Prenez mes idées, j’en aurai d’autres.”
Coco Chanel
Je vois que certains semblent regretter cette diffusion très large de végétaux qui deviennent du coup moins rares. Ce n’est pas mon cas. Même si les espèces fruitières de mon jardin deviennent tous les jours un peu moins originales, je me réjouis de compter plus d’expérimentateurs. Je constate aussi que les personnes qui acclimatent ces végétaux s’investissent méticuleusement dans la compréhension de ces nouvelles plantes. Alors que moi, en tant que généraliste, je survole chaque espèce sans approfondir. Et il y a tant à découvrir… L’année dernière à la même époque je m’inquiétais de voir la communauté française de l’acclimatation fruitière en retrait par rapport à celles d’Italie, d’Australie ou des USA. Et bien, je trouve que cela bouge pas mal, et même s’il y a toujours de l’inertie j’ai plaisir à partager avec des acclimateurs très pointus nos observations et nos végétaux !
Je suis toujours sollicité par des jardiniers qui souhaiteraient que je leur donne des végétaux. Je procède à des échanges avec plaisir, mais il est vrai que les végétaux que je recherche – compte tenu de mon ancienneté (cela fait plus de 20 ans que j’ai semé mon premier avocatier mexicain) – sont fort rares. Et je suis assez avare compte tenu de la faible fertilité de mon sol (et donc de végétaux peu vigoureux). D’autre part, je me rend compte que parfois des gens me réclament du greffon sans savoir greffer, ni même avoir de porte-greffe pour le recevoir ! Ma vocation est essentiellement d’informer. Je ne garde pas comme un secret la connaissance d’une plante rare. J’essaie de diffuser ce savoir, et je ne vois pas d’un mauvais œil que quelqu’un d’autre possède une plante rare que je n’ai pas pour peu qu’il partage ses observations. Je vous conseille de nous rejoindre sur le fil Telegram qui compte de nombreux jardiniers qui partagent au fil de leurs découvertes les nouvelles de leur verger. C’est un lieu où j’ai appris pas mal de chose et fait de belles rencontres qui je l’espère un jour se concrétiseront dans la vraie vie !
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